Depuis que, dans les années 1970, les viticulteurs californiens se sont intéressés aux fûts de chêne neuf pour élever leurs vins, la tonnellerie, en voie de disparition, a retrouvé ses lettres de noblesse. Ses derniers bastions avaient survécu dans les régions de Cognac et d’Armagnac car aucune eau-de-vie de qualité ne saurait vieillir ailleurs que dans du chêne neuf. Parmi les fûts, la barrique de 225 litres occupe une place particulière dans le Bordelais.

Si les viticulteurs sont toujours partagés sur la qualité de chêne convenant à leur vin, à Cognac on a choisi depuis longtemps ; ce ne peut être que du chêne du Limousin ou de la forêt de Tronçais, dans l’Allier, au nord de Clermont-Ferrand. En Gascogne, en revanche, on ne jure que par les chênes noirs de Monlezun. Seuls les arbres des forêts d’altitude sont appropriés. Ils ne sont abattus que s’ils sont âgés d’au moins 250 ans et mesurent 40 à 60 cm de diamètre. Le merrain, partie du tronc dépourvue de noeuds et facile à fendre, est coupé en tronçons de 1,10 mètre de longueur. La porosité du bois, son grain, et la qualité de son acide tannique sont déterminants. Le grain dépend de la rapidité et de la régularité de croissance de l’arbre. Plus celle-ci est lente et homogène, plus les cernes sont rapprochés, et plus le grain est fin. Les chênes de l’Allier sont réputés pour leur finesse et l’élégance de leurs tanins. Ceux du Limousin, plus i poreux, fournissent des matières tannantes plus fortes.

Une fois que le bois a séché suffisamment longtemps à l’extérieur, il peut être travaillé. Les douelles destinées aux fûts cle vin doivent sécher au moins deux ans, contre trois ans et plus pour le cognac. Pendant ce temps, la pluie et la chaleur éliminent la sève acide et les substances amères. Pour pouvoir cintrer les douelles, le tonnelier place le fût au-dessus d’un feu qui chauffe leur face interne, tandis que la face externe reste humide. Le processus est primordial pour l’arômé que le fût donnera plus tard à son contenu. Cette chauffe apportera une note prononcée de café. La qualité du chêne, la longueur de son séchage, la précision du chauffage et la perfection du travail du tonnelier font la qualité d’un fût, donc du cognac qui y séjournera des dizaines d’années. Plusieurs tonnelleries se sont ainsi installées dans les Charentes pour livrer aux grandes maisons de cognac les fûts dont elles ont besoin.