Le vin est une solution complexe composée d’eau, d’alcool, d’acides, de sucres et de composés aromatiques. Voici sa composition technique complète.

Le vin est un produit fermenté issu du raisin, mais sa composition dépasse largement cette définition simplifiée. Il s’agit d’un liquide complexe, fruit de réactions biochimiques multiples, influencées par des facteurs variés : cépage, climat, sol, vinification, élevage. Comprendre de quoi est composé le vin n’est pas une démarche abstraite réservée aux œnologues : c’est une base technique utile pour tout professionnel de la filière, qu’il soit producteur, distributeur, sommelier ou caviste.

Ce liquide contient des centaines de substances chimiques, présentes à des concentrations très variables. Elles interagissent entre elles, influençant les arômes, la texture, la stabilité, la couleur, et même le vieillissement en bouteille. Parmi les composés dominants : l’eau, l’éthanol, les acides organiques, les sucres résiduels, les tanins, les anthocyanes, les composés phénoliques, les minéraux et les composés volatils.

Chaque vin, qu’il soit blanc, rouge ou effervescent, possède sa propre signature chimique. Mais tous partagent une structure commune. Cet article examine avec rigueur chacun de ces éléments, en donnant des données chiffrées précises, utiles à ceux qui manipulent, analysent ou commentent le vin au quotidien.

Une matrice dominée par l’eau et l’alcool

Une base hydrique incontournable

Le vin est constitué majoritairement d’eau. Celle-ci représente en moyenne 85 % du volume total. Il s’agit essentiellement de l’eau contenue dans les baies de raisin avant la fermentation. Son rôle est crucial : elle constitue le solvant des autres composés, permettant leur dissolution, leur mobilité, et donc leur interaction sensorielle. La qualité de cette eau n’est pas anodine. Elle dépend directement de la vigne, du climat, du type de sol, et même du moment des vendanges.

Cette proportion d’eau varie légèrement selon le degré alcoolique, la concentration en sucres et la méthode de vinification. Dans certains vins liquoreux ou fortifiés, elle peut descendre sous les 80 %.

L’éthanol, molécule centrale du vin

Le deuxième composant du vin est l’éthanol, produit de la fermentation alcoolique des sucres par les levures. Sa concentration se situe généralement entre 11 % et 15 % vol, mais peut monter jusqu’à 20 % pour les vins mutés comme les vins de Porto.

L’alcool n’est pas neutre : il influence la viscosité, la perception tactile (on parle de « chaleur » en bouche), l’extraction des arômes et la solubilité de certains composés. Il agit aussi comme conservateur et joue un rôle microbiologique, limitant la croissance de certains agents pathogènes.

À titre d’exemple, un vin rouge à 13,5 % vol contient environ 106 grammes d’éthanol par litre. Ce paramètre est essentiel dans l’analyse chimique comme dans la réglementation (fiscalité, étiquetage, transport).

Une acidité structurante et variable

Les acides organiques : définition et rôles

Les acides organiques sont indispensables à l’équilibre gustatif du vin. Ils représentent entre 4 et 8 grammes par litre, selon les cépages et les conditions climatiques. Les principaux sont :

  • Acide tartrique (dominant dans la vigne, stable),
  • Acide malique (sensible à la fermentation malolactique),
  • Acide citrique (présent en faible quantité),
  • Acide lactique (issu de la dégradation de l’acide malique),
  • Acide acétique (produit secondaire de la fermentation).

Ces acides contribuent à la fraîcheur perçue en bouche, mais aussi à la stabilité microbiologique et à la capacité de garde.

Des concentrations influencées par le climat

Les vins produits dans des régions chaudes (sud de l’Espagne, sud de l’Italie) tendent à être moins acides, car la chaleur accélère la dégradation de l’acide malique. À l’inverse, un riesling allemand peut atteindre 9 g/L d’acidité totale, avec un pH bas (2,9 à 3,1), lui conférant une tension marquée.

Le pH du vin, situé entre 3 et 4, est une donnée technique clé : il influence la couleur, la stabilité chimique, et la sensibilité à l’oxydation.

Des sucres résiduels et leurs implications

Les sucres fermentescibles et non fermentescibles

La quantité de sucres résiduels dans un vin dépend du niveau de fermentation atteint. Un vin sec contient moins de 2 g/L de sucres, tandis qu’un vin doux peut dépasser 100 g/L, comme dans un Sauternes ou un Tokaji.

Les principaux sucres présents sont le glucose et le fructose. D’autres sucres comme le saccharose, le pentose ou l’arabinose sont présents à l’état de trace, mais jouent un rôle dans le vieillissement ou les interactions colloïdales.

Ces sucres sont importants pour le profil aromatique. Dans un gewurztraminer vendanges tardives, par exemple, les sucres non fermentés accentuent les notes de litchi, de rose, et équilibrent l’alcool.

Conséquences sur la perception gustative

La présence de sucre augmente la viscosité perçue en bouche et peut masquer partiellement l’acidité ou l’amertume. Mais au-delà du goût, le sucre influe sur la stabilité microbiologique, car il peut nourrir des levures indésirables. D’où l’importance du sulfitage pour les vins moelleux ou liquoreux.

Des composés phénoliques aux effets sensoriels majeurs

Tanins, anthocyanes et autres phénols

Les composés phénoliques sont plus concentrés dans les vins rouges, car ils sont extraits de la pellicule, des pépins et parfois des rafles pendant la macération.

Les plus notables sont :

  • Tanins (structure et astringence),
  • Anthocyanes (pigments rouges, bleus),
  • Flavonols (protection UV, amertume),
  • Stilbènes (dont le resvératrol, antioxydant).

La concentration en tanins varie de 1 à 4 g/L selon la durée de macération, le cépage (cabernet sauvignon, syrah, nebbiolo sont riches), et la vinification.

Fonctions techniques et sensorielles

Les tanins influencent la structure, la longueur en bouche, et la capacité de vieillissement. Ils interagissent avec les protéines salivaires, créant la sensation d’astringence.

Ils sont également essentiels dans la précipitation tartrique et les phénomènes de stabilisation de la couleur. Dans un vin comme le Barolo, un vieillissement prolongé en fût permet de polymériser ces tanins, réduisant leur agressivité.

Des composés aromatiques complexes et instables

Arômes primaires, secondaires, tertiaires

Le vin contient des centaines de composés volatils, souvent en très faible concentration (de l’ordre du microgramme par litre), mais à forte influence sensorielle. On distingue :

  • Arômes primaires : issus du cépage (muscat, sauvignon),
  • Arômes secondaires : issus de la fermentation (esters, alcools supérieurs),
  • Arômes tertiaires : issus de l’élevage ou du vieillissement (boisé, oxydatif, épicé).

Par exemple, un chardonnay élevé en fût peut contenir des lactones, des phénols volatils, ou des composés vanillés comme la vanilline, libérée par la chauffe du bois.

Des seuils de perception très bas

Certains arômes ont des seuils de détection extrêmement faibles. Le β-damascénone, molécule présente dans les vins rouges, est détectable dès 0,05 µg/L, mais apporte une note fruitée intense.

Ces molécules sont instables : elles peuvent disparaître sous l’effet de l’oxygène, de la température ou de l’évolution en bouteille. Le travail du vigneron consiste donc à préserver ces arômes tout au long de la chaîne, du pressurage à la mise.

Une fraction minérale et des traces métalliques

Cations et anions en faible proportion

Le vin contient également des sels minéraux, à hauteur de 2 à 3 g/L, principalement sous forme d’ions : potassium, calcium, magnésium, sodium, phosphates, sulfates.

Ces minéraux influencent la stabilité colloïdale, la précipitation tartrique et parfois même la sensation gustative. Un excès de potassium, par exemple, peut faire baisser l’acidité perçue.

Métaux et réglementation

Des traces de fer, cuivre, zinc, plomb ou cadmium peuvent également être présentes, issues du sol, des cuves ou des traitements phytosanitaires. Les normes européennes imposent des seuils stricts : par exemple, le plomb ne doit pas dépasser 0,15 mg/L.

Ces éléments sont systématiquement contrôlés pour garantir la sécurité sanitaire du produit final.

composition du vin