Grand Cru d’Alsace au nord de Colmar, l’Altenberg de Bergheim du Domaine Marcel Deiss mêle complantation, terroir marno-calcaire et élevage de garde.

Origine

L’Altenberg de Bergheim est un Grand Cru d’Alsace situé sur la commune de Bergheim. Le coteau s’étire entre 220 et 320 m d’altitude (722 à 1 050 ft) sur le versant sud du Grasberg. Les sols sont marno-calcaires jurassiques, très pierreux, riches en fossiles, avec une signature sèche et chaude sous l’effet d’abri des Vosges. La surface officielle atteint 35,06 ha (86,6 acres). Le site se trouve au cœur du champ de failles de Ribeauvillé, facteur de grande hétérogénéité lithologique et d’expression minérale.

Altenberg de Bergheim du Domaine Marcel Deiss

Type et cépage

L’Altenberg de Bergheim porte une appellation Grand Cru destinée aux vins blancs. Particularité: l’appellation autorise l’assemblage. La règle prévoit 50–70 % de Riesling, 10–25 % de Pinot Gris, 10–25 % de Gewurztraminer, avec jusqu’à 10 % cumulé d’autres cépages traditionnels s’ils ont été plantés avant 2005. Cette architecture permet d’ajuster la tension acide (Riesling), le volume (Pinot Gris) et la puissance aromatique (Gewurztraminer). Au Domaine Marcel Deiss, l’approche repose sur la complantation: les cépages sont plantés ensemble, vendangés et pressurés en même temps afin d’exprimer la typicité du lieu. Le style associe densité, salinité, allonge et, selon le millésime, une douceur résiduelle issue de maturités élevées et d’épisodes de botrytis contrôlé.

Historique du Altenberg de Bergheim

La mention d’Altenberg à Bergheim remonte au XIIe siècle dans les archives locales. La renommée tient à la régularité des vins et à la capacité du coteau à produire des blancs de garde. En 1983, Altenberg de Bergheim figure parmi les premiers lieux-dits promus Grand Cru lors de la création du périmètre initial. Les années 1990–2000 voient l’essor d’une lecture terroir plus stricte. À Bergheim, plusieurs producteurs, dont Marcel Deiss, plaident pour une reconnaissance officielle des assemblages de cépages comme expression historique du site. Le cadre réglementaire évolue ensuite pour autoriser l’assemblage au sein de ce Grand Cru, avec des proportions précises assurant l’équilibre du vin. Cette zone, protégée des pluies par les Vosges, bénéficie d’automnes longs et clairs, propices à des maturités élevées et à des vendanges tardives lorsque la saison s’y prête. Aujourd’hui, le cahier des charges souligne des rendements plafonnés et un suivi qualitatif renforcé. Le profil aromatique typique combine agrumes confits, épices douces, notes fumées et une minéralité calcaire marquée.

Altenberg de Bergheim du Domaine Marcel Deiss

Le Domaine Marcel Deiss

Le Domaine Marcel Deiss se situe à Bergheim. La maison est fondée en 1947 et se transmet de génération en génération. Elle conduit aujourd’hui environ 38 ha (94 acres) répartis sur de nombreux crus et lieux-dits. La viticulture est biologique et biodynamique, avec certifications AB, Ecocert et Demeter; le domaine adhère aussi à Biodyvin. L’idée centrale est la complantation: 13 cépages alsaciens peuvent cohabiter selon les terroirs, pour une vendange et une vinification communes. Cette pratique vise une cohérence agronomique (résilience climatique, régularité de maturité) et une lecture purement géologique du vin. Les travaux culturaux privilégient les sols vivants, l’enherbement, les composts et des interventions limitées. En cave, les levures indigènes mènent des fermentations lentes; l’élevage se fait sur lies, dans de grands contenants, avec un soufre modéré. À la tête du domaine, Mathieu Deiss œuvre aux côtés de son père Jean-Michel Deiss. Les crus phares incluent Altenberg de Bergheim, Mambourg, Schoenenbourg, ainsi que des crus de granites et calcaires comme Langenberg, Engelgarten ou Gruenspiel. La ligne de conduite: exprimer le lieu avant le cépage, dans des vins d’énergie, de tension et de longévité.

Les vins du Domaine Marcel Deiss

Sur l’Altenberg de Bergheim, plusieurs millésimes récents méritent l’attention. 2015 affiche une matière ample et une acidité nette, saluée par la critique (96/100 chez Wine Advocate; fenêtre de garde étendue). 2019 livre un équilibre précis, souvent demi-sec selon les lots, avec des prix courants autour de 85–110 € au détail. 2020 se distingue par sa pureté et sa salinité, déjà lisibles; 2021 montre une tension supérieure et atteint 95/100 chez Wine Advocate. Les millésimes 2001 et 2008 conservent, aujourd’hui encore, une tenue remarquable si les bouteilles ont été bien gardées; les profils varient de sec puissant à tendre selon richesse résiduelle. Les tarifs constatés pour Altenberg de Bergheim oscillent généralement entre 80 et 130 € la bouteille selon l’année, la provenance et la disponibilité. Les autres cuvées du domaine donnent des points d’entrée complémentaires: Engelgarten autour de 35–45 € (droiture granitique), Langenberg souvent 35–45 € (granite, verticalité), Mambourg 85–110 € (calcaire chaud, grande puissance). Pour l’achat, viser des provenances sûres, vérifier la chaîne du froid et privilégier des niveaux et bouchons intacts sur les millésimes anciens.

Altenberg de Bergheim du Domaine Marcel Deiss

Quelques comparaisons

Dans la même famille stylistique en Alsace, le Grand Cru Kaefferkopf (Ammerschwihr) autorise aussi l’assemblage. Les cuvées de Meyer-Fonné ou Jean-Baptiste Adam montrent des blancs d’architecture et de profondeur comparables, avec des prix plus contenus, souvent 30–55 € selon cépage et millésime. Le Grand Cru Zotzenberg se singularise par l’acceptation du Sylvaner à haut niveau; des maisons comme Boeckel proposent des bouteilles autour de 40–60 €, avec un profil plus sec, droit, sur pierre humide et anis. En France, on peut rapprocher l’Altenberg de Bergheim de certains blancs de gastronomie par la densité et l’allonge: Hermitage blanc (nord-Rhône, 80–180 € selon producteurs) offre richesse et amers nobles de Marsanne/Roussanne, mais sans les épices et le tendre parfois présent à Bergheim; un Meursault 1er cru bien né (70–150 €) partage volume et longueur calcaire, avec une trame boisée plus marquée et un monocépage Chardonnay. Enfin, au sein du domaine, Schoenenbourg pourra plaire aux amateurs d’acier et de droiture, tandis que Mambourg séduira celles et ceux recherchant ampleur et chaleur calcaire. Ces comparaisons aident à calibrer l’achat selon tables, mets et budgets.

Cours d’Oenologie est un magazine indépendant sur le vin.