Les tendances du vin bio en France en 2025
Un marché en recomposition : surfaces en repli, ventes en hausse, circuits qui se déplacent, prix sous tension. Données, ROI et conseils d’achat.
En résumé
Le marché français du vin issu de la viticulture biologique reste dynamique mais change de physionomie. Les surfaces de vignes certifiées reculent légèrement, tandis que les ventes progressent en valeur grâce à une offre mieux ciblée et à des circuits variés. La grande distribution pèse moins dans les débouchés du vin bio, au profit des cavistes et de la vente directe. Côté prix, l’écart persiste entre bio et conventionnel selon les segments, mais la demande se recentre sur des repères accessibles. Pour l’investisseur, l’étiquette bio n’assure pas un retour sur investissement supérieur : la performance dépend d’abord du producteur, de la rareté et du cycle du marché. Les régions motrices restent l’Occitanie, la Provence et la Nouvelle-Aquitaine, avec des styles différents en rouge, blanc, rosé et effervescents. Enfin, l’enjeu environnemental se déplace vers la bouteille allégée, la logistique et la traçabilité tout au long de la chaîne.
Le marché du vin bio en France
La France compte 164 541 hectares de vignes conduites en bio en 2024, soit environ 21 % du vignoble, en léger repli par rapport à 2023. Ce recul s’inscrit dans un contexte de surfaces agricoles bio en baisse, mais le vin demeure l’un des segments les plus structurés.
En 2024, les ventes de vin bio à domicile dépassent 1,4 milliard d’euros, en progression sur un an, avec une réorientation des circuits.
Trois régions concentrent près des trois quarts des vignes bio : Occitanie (environ 34 %), Provence-Alpes-Côte d’Azur (21 %) et Nouvelle-Aquitaine (18 %).
Dans la grande distribution (hors EDMP), la part du vin bio au premier semestre 2024 atteint 3,7 % en volume et 5,7 % en valeur ; les blancs résistent mieux que les rouges, tendance observée sur l’ensemble du rayon.
Les certifications et la traçabilité
La certification AB s’appuie sur le règlement européen (UE) 2018/848 et des contrôles annuels par des organismes tiers (Ecocert, Bureau Veritas, etc.). Le dossier suit chaque lot, depuis la parcelle jusqu’à la mise en bouteille : c’est le socle de la traçabilité.
La biodynamie ajoute des exigences (préparations, calendriers culturaux, vinifications) avec des labels comme Demeter ; elle reste une démarche volontaire, cumulable avec l’AB.
Pour l’acheteur, ces logos ne garantissent pas un style gustatif unique : ils informent sur les pratiques et l’absence d’intrants de synthèse à la vigne.
Les cépages et les styles
Le marché du vin bio couvre tous les profils :
– Le vin rouge bio : Grenache, Syrah, Carignan et Mourvèdre dominent au Sud ; Merlot, Cabernet-Sauvignon et Cabernet franc en Bordelais ; Pinot noir en Bourgogne ; Gamay en Beaujolais.
– Le vin blanc bio : Sauvignon blanc et Chenin en Loire ; Chardonnay en Bourgogne ; Rolle (Vermentino) en Provence ; Ugni blanc et Colombard dans le Sud-Ouest.
– Rosé bio en Provence et Languedoc ; pét-nat bio (méthode ancestrale) en progression dans l’artisanal ; crémants bio en Loire et Bourgogne.
– Les cuvées sans sulfites ajoutés existent mais restent minoritaires ; elles demandent une chaîne du froid et une traçabilité rigoureuse.
– La biodiversité au vignoble (haies, couverture végétale) et la réduction des intrants orientent les styles vers plus de fraîcheur et moins d’extraction.
Les volumes et les prix
Côté volumes, les vins bio s’ajustent à une demande en recomposition, avec des déclassements en baisse entre 2023 et 2024, signe d’un meilleur équilibre offre–demande.
En prix consommateur, le prix moyen toutes couleurs confondues en GMS se situe autour de 5,23 €/litre (≈ 3,92 € la 75 cl), l’écart avec le bio dépendant des segments et des promotions.
Sur le vrac, l’écart de prix entre bio et conventionnel reste significatif : autour de 50 % en IGP, davantage sur certains VSIG.
Dans la même période, au sein du rayon, les vins bio pèsent davantage en valeur qu’en volume (5,7 % vs 3,7 %), traduisant un positionnement de gamme.
Les circuits de vente et la distribution
La distribution du vin bio en GMS recule dans le mix des débouchés : la contribution de la grande distribution aux ventes de vin bio est passée de 22 % en 2019 à 14 % en 2024. Les cavistes, artisans et la vente directe au domaine bio gagnent du terrain.
Les cavistes spécialisés en vin bio valorisent les AOP/IGP et les cuvées confidentielles, tandis que la restauration responsable privilégie des cartes courtes, locales et saisonnières.
La vente en ligne progresse sur l’ensemble du rayon vin et représente environ 8 % des ventes au détail en valeur ; les sites de producteurs montent en puissance pour les achats directs.
Les investissements : performance et risques
Les vins bio sont-ils un bon investissement ? À court et moyen terme, la performance du marché secondaire dépend d’abord de la région, du producteur et de la rareté. Les indices Liv-ex ont reculé ces deux dernières années (Burgundy 150 environ –30 % sur deux ans ; marché global –21 %), rappelant que le cycle prime l’étiquette.
Des travaux académiques montrent toutefois qu’une éco-certification peut être associée à un léger surcroît d’évaluation par les experts, ce qui se traduit parfois par un premium prix, sans garantie systématique de retour sur investissement.
En synthèse : l’AB ou Demeter peuvent soutenir la demande, mais l’alpha de long terme reste lié à la signature (Loire de référence, Bourgogne village d’un vigneron recherché, Champagne de récoltant reconnu), au millésime et à la liquidité.
Les pratiques environnementales et la logistique bas carbone
Au-delà de la vigne, l’impact carbone d’1 litre de vin se situe entre 1 et 1,5 kg CO₂e, dont plus de la moitié provient de l’emballage. L’allègement du verre et le réemploi sont donc des leviers efficaces.
Passer d’une bouteille standard à une bouteille allégée réduit sensiblement l’empreinte ; changer la teinte (verre vert), adopter des BIB ou des consignes peut encore abaisser les émissions, avec des ordres de grandeur de plusieurs centaines de gCO₂e par litre.
La logistique bas carbone (groupage, transport rail/route, palettes optimisées) et le packaging écoresponsable complètent l’équation environnementale, désormais prise en compte par les acheteurs professionnels.
Les régions et les opportunités
– La Loire bio : sauvignons ciselés (Sancerre, Menetou), chenins en secs et liquoreux ; fourchettes usuelles de 10 à 25 € au détail. Tendances : crémants bio, pét-nat bio.
– Le Languedoc bio : socle d’Occitanie, grand choix en IGP et AOP à prix tendus (8 à 18 €), rouges au fruit net, blancs méditerranéens ; montée des rosés.
– La Provence bio : rosés identifiés (12 à 25 €), blancs de Rolle plus présents, démarches biodynamie dans plusieurs crus.
– Le Bordeaux bio : cabernets/merlots à style plus digeste, meilleurs rapports prix/plaisir sur Fronsac, Castillon, Graves (10 à 25 €).
– La Bourgogne bio : volumes limités, prix élevés ; choisir des appellations régionales sérieuses et les années favorables pour un ROI équilibré.
Les conseils pratiques pour l’acheteur
- Lire les étiquettes : certification AB et numéro d’organisme ; Demeter pour la biodynamie.
- Adapter le budget : le prix moyen bio reste supérieur au conventionnel sur plusieurs segments ; viser des zones de valeur (Languedoc, Loire).
- Choisir le circuit : caviste et vente en ligne pour la diversité ; GMS pour les promotions bien identifiées.
- Repérer les styles : la viticulture biologique n’impose pas un goût ; le profil résulte du cépage, du terroir et de la vinification.
- Intégrer l’environnement : vérifier la bouteille allégée, le bouchage, l’expédition ; privilégier les producteurs qui publient leurs démarches.
Cours d’oenologie est un magazine indépendant.
