Le développement du vin à travers le monde a pris une telle ampleur que, lors des épreuves de dégustation pour le diplôme du « Master of Wine » qui se sont tenues simultanément à Londres , Sydney et Napa en juin 2006, les trente-six crus que les étudiants devaient immédiatement reconnaître incluaient un Carménère du Chili, un Torrontès blanc d’Argentine et un rouge de l’île grecque de Santorin. En tant que responsable de la mise à jour, tous les six ou sept ans, de deux ouvrages de référence essentiels, « L’Atlas mondial du Vin » et « The Oxford Companion to Wine » – la Bible des apprentis œnologues , publiée par l” Oxford University Press -, je suis parfaitement au courant des mutations rapides du monde du vin. Traditionnellement, les régions viticoles du globe se situaient dans les zones tempérées, grosso modo entre les 30ème et 50ème parallèles. Le changement climatique et la multiplication des passionnés du vin, séduits par l’idée bucolique de sa production et le « style de vie » qu’elle engendre, ont repoussé les limites de la viticulture dans les deux hémisphères. C’est ainsi que des vignobles ont été créés dans l’Otago Central, sur l’île du Sud de la Nouvelle-Zélande, à Mulchen dans le Chili méridional ou dans la vallée de l’Okanaga en Colombie Britannique. Même le Danemark s’est lancé dans la culture de la vigne. Mais la principale caractéristique du développement actuel la viticulture est la présence incontournable d’une grande partie de l’Asie. Quand j’ai commencé à écrire sur le vin, dans les années 1970, il était communément admis que certains traits physiologiques des Asiatiques les rendaient incapables d’apprécier et de s’intéresser au processus de fermentation du jus du raisin. Quelle grande erreur ! La courbe des prix des vins n’a cessée de croître notamment sous la pression et l’intérêt des asiatiques pour les vins. Maintenant, c’est au tour des régions qui se démocratisent, comme la Russie et l’Asie centrale, de découvrir les vins, et de continuer de pousser les opportunités et les prix vers le haut. Mais c’est sans doute une bonne chose pour toute la filière française, si elle sait s’organiser.